____Vendredi. J'avais été assez surpris par la réaction de Gajeel. Pourtant, je n'inventais rien. Il avait bel et bien essayé de me tuer. L'image du cadavre de Baki avait dû lui monter à la tête et il avait dû perdre son sang-froid. Je n'étais pas loin derrière. Cette scène m'avait profondément ébranlé, et je sentais encore en moi un léger tremblement. Ou bien était-ce dû à la tentative de Gajeel de me tuer ?
____Je pris un pont joliment sculpté et m'apprêtai à entrer dans une sorte de parc. Je lu la pancarte à l'entrée. Île de Versailles. J'observai les alentours. Effectivement, c'était bien une île, au milieu de l'Erdre, reliée aux berges par quelques ponts. J'y entrai. Sur ma gauche, un parc pour enfants, avec des jeux. Sur ma droite, un chemin au milieu des feuillage. Je m'apprêtai à prendre à droite lorsque je cru apercevoir un mouvement dans le parc pour enfant. Je ramassai une branche, histoire d'avoir de quoi me défendre – même si je ne voyais pas trop en quoi une branche comme celle-ci pouvait me défendre – et je m'approchai de l'endroit qui m'avait attiré l’œil. Quelqu'un semblait se trouver dans la petite cabane pour enfants. Pas à pas, je regardai à l'intérieur.
____Un corps était recroquevillé sur lui-même. De longs cheveux rouges couvraient le visage de la personne.
____« Yuuko ?
Pas de réponse. Je craignais le pire. Je posai une main sur son épaule.
____- Y-Yuuko ?
____A mon grand soulagement, Yuuko leva la tête. En me voyant, elle hurla. Je tentai de l'apaiser comme je pu.
____- Yuuko ! N'aie pas peur ! C'est moi ! Je ne vais rien te faire !
Ses cheveux étaient en batailles, son visage plein de larmes. Elle avait maigri et avait des cernes sous les yeux.
____- Va-t'en !
____- Yuuko, je te promets, je...
____- Va-t'en !
____Elle était complètement sur les nerfs. Elle semblait à bout de force. Je ne voyais qu'une solution pour la calmer. Je l’empoignai. Elle cria, voulut se défendre, mais n'avait aucune force. Je la sortis de la cabane et la serra dans mes bras. Elle ne se débattit plus, pleurant toutes les larmes de son corps. Je l'emmenai sur le banc le plus proches et nous nous assîmes. Je ne voulais pas la rendre plus malheureuse qu'elle ne l'était déjà, mais j'avais besoin de savoir.
____- Que t'est-il arrivé depuis lundi... ?
Tremblante, Yuuko ne répondit qu'après une bonne minute de silence.
____- Je... j'étais soudainement près du fleuve. Je n'osais pas retrouver les autres, j'avais trop peur de ce qu'il pourrait arriver, et... j'ai eu des visions, et...
Elle se tut un instant, assaillie par les sanglots. Elle aussi avait vu ses proches mourir.
____- J'ai voulu trouver un endroit où me cacher, reprit-elle en reniflant, et j'ai vu... j'ai vu Baki...
Je fermai les yeux. Je ne voulais pas repenser à ce que j'avais vu.
____- Je sais, dis-je simplement, afin qu'elle n'en dise pas plus sur l'horreur.
____- Alors j'ai trouvé cet endroit, termina-t-elle en essuyant ses larmes.
____- Et tu n'en es jamais sortie ?!
Elle secoua la tête.
____- Mais... tu n'as rien mangé alors ?
Elle ne répondit pas.
____- Viens avec moi, lui dis-je en me levant.
____- Où ça ? Demanda Yuuko, angoissée.
____- On va trouver à manger. Les magasins sont déserts et pleins, on y trouve tout ce dont on a besoin pour se nourrir.
Yuuko se leva à son tour. Elle vacilla. Il était urgent de lui trouver à manger.
____- Restons ensemble. J'ai décidé de ne tuer personne. Je ne te ferai aucun mal.
____- Mais qu'est-ce qui te prouve que moi je ne te ferai rien ?
Je la dévisageai de la tête aux pieds.
____- Dans l'état où tu es ? »
Yuuko esquissa un faible sourire. Nous quittâmes l'île.